Flambée mondiale des prix des céréales : La tonne de blé dur atteint 240 euros Anticipant le vent de révolte qui allait ébranler certains pays arabes, notamment, ceux de la rive sud de la Méditerranée certains Etats – parmi lesquels l’Algérie, l’Egypte et la Libye – se sont précipités, dès la fin de l’année 2010, sur les marchés nord-américains et français en particulier pour y acheter des quantités impressionnantes de blé.A elle seule, l’Algérie a dépensé en 2010 près de deux milliards d’euros, histoire de se mettre à l’abri d’éventuelles pénuries qui pourraient exacerber encore davantage un front social en ébullition. Pour l’année en cours, elle a déjà placé une commande d’un peu plus d’un milliard d’euros qui sera très probablement suivie par une autre du même montant d’ici la fin de l’été, quand bien même la récolte de blé serait, aux dires de notre ministre de l’Agriculture, exceptionnellement bonne.
Cette subite main basse sur la production mondiale de céréales, déjà très fortement affectée par les effets du réchauffement planétaire, va propulser les prix de cette denrée de base à des niveaux insoupçonnés. C’est ainsi que le prix moyen de la tonne de blé, qui n’était que de 90 euros au cours des quatre dernières années, a atteint 240 euros en fin de semaine sur le marché français, et tout porte à croire qu’il n’arrêtera pas de grimper, favorisé en cela par un contexte de pénurie aggravé par les spéculations boursières et autres transactions informelles qui ne manquent pas de se manifester quand la demande tend, comme c’est actuellement le cas, à surclasser l’offre.
Plusieurs facteurs conjoncturels, mais aussi et surtout structurels sont à l’origine de ce rétrécissement de l’offre de céréales en général (maïs, orge, etc.) et du blé en particulier. La sécheresse qui affecte depuis au moins quatre années consécutives les principaux pays producteurs (USA, France, Ukraine etc.) mais également les productions locales qui servaient d’appoint à l’offre mondiale constituent les principales causes de cette forte et subite restriction de l’offre. D’autres facteurs y ont également contribué. On citera en premier lieu la baisse des stocks de blé au niveau des principaux pays producteurs, dont une partie de plus en plus importante est réservée à leurs propres populations en constante augmentation. Cette moindre abondance de céréales sur certains marchés étrangers aurait même tendance à virer à la pénurie en raison des rétentions de stocks effectuées par certains Etats, parfaitement conscients que le blé peut, quelquefois, constituer une véritable arme que redoutent tout particulièrement les pays dont la ration alimentaire est en grande partie constituée de cette denrée.
L’autre cause, et non des moindres, à l’origine de la baisse tendancielle de l’offre mondiale de blé réside dans l’affectation de surfaces agricoles autrefois réservées aux cultures de céréales à d’autres types de plantations (soja, tournesol) destinées à la production de biocarburants qui rapportaient beaucoup que les céréales avant que les prix de ces dernières ne s’envolent. Ce sont des centaines de milliers d’hectares qui auraient ainsi été détournés de leur vocation céréalière à travers le monde, selon les estimations de la FAO.
Quelle conséquence pourrait avoir cette restriction mondiale de blé sur l’Algérie, sachant que cette denrée, qui constitue l’aliment de base des Algériens, poserait problème si elle venait à manquer ? Les prix des farines de blé étant soutenus par l’Etat ce sont, évidemment, les finances publiques qui en supporteront les conséquences, heureusement à une période de forte embellie due à l’envolée des prix des hydrocarbures.Tous les produits céréaliers autres que les blés n’étant pas concernés par le soutien des prix, il faut néanmoins s’attendre à ce que les aliments, notamment ceux réservés au bétail, augmentent sensiblement, avec toutes les répercussions négatives sur les prix des viandes blanches et rouges, qui ont du reste atteint des niveaux records.