Sonatrach résilie son contrat avec Technip
Sonatrach vient de rompre unilatéralement le contrat la liant à la société française Technip, chargée de la modernisation et de l’augmentation des capacités de la raffinerie de Sidi Arcine (Alger).
Les travaux sont à l’arrêt depuis l’annonce, début mai, de la décision de résilier le contrat entre le groupe pétrolier algérien et la multinationale française. Des sit-in ont été observés par les travailleurs de Technip à l’intérieur de la raffinerie, depuis l’annonce de la décision. Des négociations avaient été engagées avec l’employeur pour indemniser les 200 employés qui se sont retrouvés au chômage.
«Les responsables de Technip ont proposé une indemnisation au cas par cas, proportionnelle au nombre de mois travaillés. Les travailleurs, eux, ont exigé un plafonnement pour tout le monde», précise un travailleur, tout en balayant d’un revers de la main la «rumeur» selon laquelle Sonatrach aurait proposé des contrats aux employés licenciés.
L’installation de la société française chargée du management de projets, de l’ingénierie et de la construction de la raffinerie de Sidi Arcine, dans la banlieue sud-est d’Alger, s’est accompagnée de plusieurs problèmes. En plus du coût social (licenciement), le projet cause un préjudice important au pétrolier national : le budget initial de 67,9 milliards de dinars (908 millions de dollars) a été revu à la hausse et le délai initial, qui était de 40 mois, devrait passer à 52 mois. «La dernière réunion entre Sonatrach et Technip a été houleuse, elle a été tenue en présence d’un huissier de justice», affirme une source au ministère de l’Energie, sous le sceau de l’anonymat.
Écueils et retards
Le projet, qui devait permettre la réalisation de nouvelles installations et le revamping de la vieille raffinerie, serait un «copier-coller» d’une usine réalisée dans le golfe Persique. «Le projet ne faisait pas l’unanimité parmi les cadres de Sonatrach pour des raisons de sécurité. Technip, qui n’ignorait pas la nature du sol dans cette partie du pays, n’admettait pas, par exemple, que le CTC vienne lui demander d’adapter ou d’actualiser ses plans conformément au règlement parasismique algérien. Pourtant, le CTC a mobilisé ses ingénieurs de l’Ouest pour accélérer la procédure d’approbation des plans. Il a même affecté un ingénieur en permanence sur le site», précise notre source.
Le projet, confié en 2010 à la multinationale française, a connu dès son lancement un retard de 8 mois dû à l’expropriation d’exploitations agricoles. Les conditions de réalisation ont été jugées difficiles, particulièrement en période hivernale, vu la nature du sol. Des accidents ont également été déplorés sur le site, malgré les mesures de sécurité prises par la société réalisatrice.
Sous-traitants engagés
Que compte faire la compagnie publique qui a annoncé l’augmentation de ses capacités de raffinage de 35% ? L’option de «reprendre» les sous-traitants étrangers est privilégiée. Le PDG d’un bureau d’études indien, EIL, est annoncé à Alger.
Cependant, même avec de nouveaux partenaires, Sonatrach ferait face à d’autres problèmes dans un projet dont le taux d’avancement est important (90%). Le groupe public et probablement ses sous-traitants aussi vont se retrouver devant un problème : le matériel de la raffinerie ou les pièces qui le constituent sont spécifiques à cette usine et non à une autre. «Les équipements ne sont pas fabriqués en série.
La conception de l’usine s’est faite en présence d’un ingénieur de Technip. Et c’est ce dernier qui est chargé de réceptionner et de vérifier sa conformité au port d’Alger. Technip n’est plus ici. Qui va attester ?», s’interroge notre source.
Une action en justice n’est pas à écarter. Mais il semblerait que Technip aurait déjà réuni ses arguments. Selon certaines indiscrétions, Technip détiendrait des preuves que l’épaisseur des canalisations de l’ancienne raffinerie n’est que de quelques millimètres, l’usage intensif et la corrosion ayant eu raison du métal.
L’ancienne raffinerie se trouve à quelques encablures d’habitations. Un rapport d’ingénieurs de l’USTHB met en avant la dangerosité du site. Le danger est dans l’ancienne raffinerie elle-même. «L’option choisie par Sonatrach, qui consiste à garder l’ancienne raffinerie et la connecter à la nouvelle, n’a pas été acceptée par Technip, qui craint une explosion», signale notre source, qui affirme que parmi les points sur lesquels ont achoppé les négociations avec Sonatrach, la proposition de «démanteler» l’ancienne usine.